Ma chérie,

J’ai écrit cette lettre sur ton ordinateur, à ton bureau, pendant que tu vendais des sandwichs. Pour te jouer un tour des plus pendables. Tu dois être morte de trouille, et aussi assez en colère. Tu es l’une des personnes les plus intelligentes que je connaisse, aussi je suis certain que tu sais très bien ce que je vais te demander de faire. Mais avant tout, laisse-moi t’expliquer pourquoi la situation a tourné ainsi.

Hier, j’ai tout installé, tiré au cordeau, chaque élément à sa place, tout en ordre, dans les détails. J’ai passé la journée à faire ça. C’était assez chiant. Et puis, en quittant l’école, j’ai croisé Tom. Il est fort pour persuader les gens, Tom. On a parlé des choses mortes.

Il a dit : une journée de diplôme, c’est attendre, comme chez le dentiste, et voir des trucs tout prêts, déjà finis. Rien n’est produit sur le coup. Rien de surprenant. J’ai marché, un peu au hasard. Le diplôme c’est surtout une belle occasion. Ce serait trop bête que rien ne se passe.

Alors ce matin je suis passé à la Mairie. Par chance, il leur manquait de l’effectif. Il m’on proposé de reprendre le service sur le champ, ils avaient même gardé mon uniforme et mon poisson. Ca ne va pas nous rapporter beaucoup d’argent, ça reste de l’extra. Désolé de te laisser comme ça, face à ces gens qui ne doivent pas y comprendre grand chose. Il paraît qu’ils sont sympas. Enfin ça reste un mauvais moment à passer, j’imagine. Sache cependant que je ne fais pas ça par lâcheté. Ni pour jouer au plus malin, doubler Slimane ou je ne sais pas quelle connerie. J’ai envie plus que tout de choses mémorables, et je sais que pour toi et moi ce jour restera celui où, emprisonné dans l’esprit d’un pêcheur abasourdi, je t’ai laissé parler seule devant de parfaits inconnus, parce que c’était plus beau comme ça.

Je suis sûr que tu seras un peu mal assurée, tu va peiner à trouver tes mots, avec de la chance tu rougira même un peu. Si je pouvais voir ça, je crois que je trouverai ça vraiment mignon.
Je t’aime,

PS : tu trouveras dans l’enveloppe le pense-bête qu’on a écrit ensemble.

Nils